Forum du Service Public de l’ONU 2025 – Combler la fracture : tenir la promesse d’une gouvernance numérique
La cérémonie d’ouverture du Forum du Service Public de l’ONU 2025 s’est tenue le 23 juin — Journée du Service Public des Nations unies — à Samarkand, en Ouzbékistan. L’événement a débuté par une allocution du Président de la République d’Ouzbékistan, prononcée par Mme Saida Mirziyoyeva, Conseillère présidentielle. Ont suivi les interventions de M. Navid Hanif, Assistant Secrétaire général en charge du développement économique au sein du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU.
Monsieur Fadil Bin Yusof, Vice‑Premier Ministre de Malaisie, a ensuite prononcé le discours d’ouverture, suivi de M. Sherzod Shermatov, Directeur national de l’Information et Ministre des Technologies numériques de la République d’Ouzbékistan. Ce dernier a présenté la Déclaration ministérielle de Samarkand, destinée à faire progresser la transformation numérique, l’innovation et une gouvernance robuste des données dans le service public. Il en a exposé sept (7) priorités : la transformation numérique des services publics, l’innovation et les technologies émergentes, une gouvernance solide des données, l’inclusion et l’équité, la cybersécurité et les droits numériques, l’action climatique et la durabilité, ainsi que la coopération internationale.
La cérémonie a chaleureusement accueilli plus de 400 délégués du monde entier à Samarkand, la « Cité du savoir ». Les points forts ont mis en valeur les récentes réussites de l’Ouzbékistan dans la transformation numérique et la modernisation du secteur public.
Face à des défis mondiaux sans précédent, les intervenants ont souligné l’urgence d’adopter une gouvernance plus intelligente, de renforcer la préparation à l’IA dans les initiatives numériques et de développer des pôles d’innovation pour bâtir des administrations modernes et résilientes. Le message clé a été un appel à passer des promesses à l’action, en encourageant les gouvernements et les institutions à concrétiser leurs engagements et à construire des sociétés performantes et axées sur les résultats.
Table ronde ministérielle – L’Esprit de Samarkand : innovation, inclusion et coopération dans le service public
À la suite de la cérémonie d’ouverture du Forum du Service Public de l’ONU 2025, une table ronde ministérielle a réuni des représentants d’un grand nombre de pays pour partager leurs expériences, idées et stratégies en matière de transformation numérique dans le secteur public. Les échanges ont porté sur l’utilisation des technologies émergentes, notamment l’intelligence artificielle, pour améliorer les services publics et la gouvernance.
L’Ouzbékistan, pays hôte, a présenté son programme ambitieux visant à devenir un pôle informatique régional, avec l’objectif d’exporter ses propres services numériques et innovations technologiques. Le pays a commencé à intégrer des outils d’IA dans l’administration publique, notamment des assistants vocaux, des systèmes de paiement biométriques, des outils d’aide à la fiscalité et des solutions d’analyse des données juridiques. Sa vision numérique inclut également le développement d’un écosystème de startups dynamiques dans les secteurs de la fintech, govtech et edtech, soutenus par deux licornes et la création de quatorze nouveaux fonds de capital-risque. Le gouvernement investit massivement dans les talents numériques, avec pour objectif de former un million de codeurs et un million de promptistes en IA. Cet engagement en faveur de l’éducation et de la culture numérique se reflète dans le classement mondial d’apprentissage en ligne de Coursera, où l’Ouzbékistan arrive en tête par rapport à sa population active. En 2026, le pays accueillera également les Olympiades internationales d’informatique, consolidant davantage son rôle de centre d’excellence numérique.
Les participants à la table ronde ont insisté sur le fait que la transformation numérique doit être inclusive et centrée sur les citoyens. Le véritable leadership consiste non pas à exhiber la technologie, mais à lever les obstacles pour permettre aux populations de façonner leur propre avenir. Cette session a constitué un appel à l’action : les idées et solutions échangées à Samarkand doivent être ramenées dans les pays participants et mises en œuvre. Les délégués ont également rappelé que l’innovation ne requiert pas nécessairement de réinventer la roue, mais souvent d’adapter et d’améliorer des modèles déjà existants.
Au cours des discussions, plusieurs pays, en particulier africains, se sont exprimés. Mme Mercy Maruva Dinha, Ministre déléguée en charge du Service Public du Zimbabwe, a mis en lumière les efforts de son pays pour autonomiser les femmes et les jeunes via l’innovation, notamment par la création de pépinières d’innovation universitaires encourageant les projets étudiants et les partenariats entre le monde académique et les entreprises. Le Zimbabwe favorise également l’apprentissage par projets dans les écoles pour développer la pensée critique, tout en œuvrant à étendre l’accès à Internet dans les zones rurales et à combler les écarts numériques de genre et de territoire grâce à des centres d’e‑recrutement et d’information.
Prenant la parole, Monsieur Kassim Haroun Ali, Ministre de la Décentralisation de Djibouti, a rappelé que son pays, jeune démocratie aux ressources limitées, est politiquement engagé dans la transformation numérique. Djibouti a élaboré une feuille de route nationale pour moderniser ses services publics, avec l’objectif de devenir une « smart nation » caractérisée par la transparence, la performance et la participation citoyenne. Une avancée majeure a été la mise en place d’un registre national biométrique, facilitant l’échange d’informations entre secteurs — sécurité, justice, fiscalité, santé et éducation.
Monsieur Fassoun Coulibaly, Ministre de la Fonction Publique et des Réformes Administratives du Mali, a exposé la politique nationale d’économie numérique lancée en 2020 et la stratégie plus large de modernisation de l’administration visant à réduire les interactions physiques pour les services courants. Parmi les réalisations figurent la déclaration et le paiement en ligne des impôts, une plateforme foncière réduisant les délais de deux ans à six mois, et des systèmes RH interconnectés pour les ministères. Un plan national de formation sur cinq ans et la création de centres d’IA et de robotique dans les universités viennent renforcer cette transformation. Le Mali a également affirmé son engagement pour la redevabilité à travers une politique nationale de transparence.
Monsieur Salamaan Jacobs, Président de la Commission de la Fonction Publique de Namibie, a souligné la difficulté de fournir des services dans un vaste territoire peu peuplé. Malgré ces défis, la Namibie a organisé des élections transparentes et lancé des initiatives de protection sociale pour les jeunes et les personnes âgées. Elle a aussi privilégié la sécurité alimentaire et l’éradication de la pauvreté non pas à travers un autre ministère, mais en intégrant ces objectifs dans tous les secteurs. L’éducation demeure gratuite et tous les ministères sont incités à contribuer à la réduction de la pauvreté.
Le Ministre de la Fonction publique et de la Réforme du Service public du Sénégal, M. Olivier Boucal, a présenté la stratégie nationale pour l’équité et l’égalité, marquée par une volonté forte d’accès égal aux services publics. Le ministère a lancé de nombreuses initiatives, notamment la promotion du leadership féminin, afin de permettre aux femmes d’accéder à des postes stratégiques dans l’administration.
D’autres interventions ministérielles concernent des partages d’expériences pratiques, des exemples concrets de résultats obtenus ainsi que des programmes et projets à venir. Monsieur Francis Motchi Belande Sade, Ministre de l’Administration publique des Îles Salomon, a présenté la stratégie de son pays pour une innovation durable dans le secteur public, en améliorant la prestation des services grâce à des systèmes financiers et RH numériques favorisant la transparence et la responsabilité. Des outils de suivi du progrès numérique entre ministères ainsi que le renforcement de la communication figuraient au cœur de cette approche.
Son Excellence M. Paata Salia, Ministre de la Justice de Géorgie, futur pays hôte du forum, a présenté d’importantes réformes axées sur les données ouvertes et la citoyenneté numérique, selon le principe « ne laisser personne de côté ». La Géorgie a mis en place des points de services numériques inclusifs, même dans les prisons, afin d’assurer un accès égal. Son cadre juridique et institutionnel garantit la durabilité de sa transformation numérique, avec une Agence dédiée au gouvernement numérique en charge de la mise en œuvre.
Le vice-président de l’Agence d’État pour le Service Public et l’Innovation Sociale d’Azerbaïdjan, M. Jeyhun Salmanov, a souligné l’importance des partenariats collaboratifs en présentant le modèle “4P” – public, privé, citoyens et international – pour étendre l’innovation dans le secteur public. Le Sénégal réaffirme également son engagement en matière d’égalité des genres et renforce les initiatives en faveur du leadership féminin à des postes clés de l’administration.
La session s’est conclue sur une note inspirante et aspirante, par un appel à s’approprier ce qu’on a appelé « l’Esprit de Samarkand ». Cet esprit invite les gouvernements à repousser les limites du savoir, à rester ouverts aux différentes cultures et approches, et à favoriser la coopération comme moteur de progrès. Avec près d’un tiers de la population mondiale toujours privée d’accès à Internet, les intervenants ont souligné que l’urgence d’agir n’avait jamais été aussi forte.